VIDÉO - Arrêts de travail par téléconsultation : dépasse-t-on les bornes ?

par Virginie FAUROUX Reportage TF1 : David de Araujo et B. Sisco
Publié le 28 août 2023 à 17h54, mis à jour le 28 août 2023 à 20h54

Source : JT 13h Semaine

Le recours à la téléconsultation via des cabines spécialisées a fortement augmenté depuis le début de l'année.
Pour de nombreux patients, c'est une solution face aux déserts médicaux.
Mais leur multiplication interroge.

Quelque part entre la farine et les sauces soja, au détour d'un rayon de supermarché en région parisienne, c'est là que se cache une cabine de téléconsultation. Elle permet de voir un médecin sans rendez-vous. À l'intérieur de cette boîte d'1 m² se trouvent plusieurs instruments : thermomètre, tensiomètre... Il suffit d'insérer sa carte vitale, de répondre à quelques questions sommaires et d'attendre. Le JT de TF1 a fait l'expérience. Après avoir décrit quelques maux de tête et un peu de température, cinq minutes plus tard, une ordonnance et un arrêt de travail "pour voir comment ça évolue" sont délivrés. 

70% des téléconsultations dans les grandes villes

Le fonctionnement de ces cabines a de quoi interroger. D'ailleurs, dans une enquête du JT de 20H en juin dernier, un journaliste de TF1 s’était fait passer pour malade lors d'un rendez-vous à distance. En à peine trois minutes à chaque fois, il avait obtenu deux arrêts de travail. Pourtant, les cabines médicales essaiment partout, dans les magasins, les pharmacies, les mairies et bientôt dans le train. La SNCF envisage en effet d'en installer plusieurs dans les prochains mois. Les trois principales entreprises du secteur (Medadom, Tessan et H4D) en revendiquent à elles seules 3200 dans toute la France. Vous sont-elles utiles ? Avez-vous confiance ? À la sortie du supermarché, la réponse dépend beaucoup de l'âge. "Pour moi, ce n'est pas un problème, je fais ça souvent pendant la semaine", revendique un jeune homme dans la vidéo du JT de 13H en tête de cet article. Tandis qu'un retraité dit que "ne pas avoir affaire à quelqu'un physiquement, ça [le] gêne" 

Défiance ou pas, selon l'opérateur Medadom, cité par Franceinfo, les téléconsultations réalisées sur ses bornes et cabines installées partout en France sont en hausse de près de 57% depuis le début de l’année : 22% de plus pour le seul mois de juillet, par rapport au même mois l'année dernière. Par ailleurs, environ 70% des téléconsultations sont effectuées dans les grandes villes. Pourtant, au départ, ces cabines étaient supposées aider les patients vivant à la campagne, dans les déserts médicaux, comme en Eure-et-Loir. La pharmacie de Courville-sur-Eure s'est ainsi équipée d'une borne de télémédecine il y a moins d'un an. Et c'est le rush. "Au plus fort, on peut avoir dix personnes et en moyenne cinq à six personnes par jour. Les rendez-vous chez le médecin sont vite à trois semaines donc les patients sont bien contents d'être accompagnés par le pharmacien et la borne", explique Blandine Ponthot, pharmacienne titulaire. 

Je considère que la santé, c'est pas fait pour faire du business, c'est fait pour soigner les gens
John Billard, maire du Favril

Un peu plus loin, au Favril, le maire, John Billard, a investi 60.000 euros dans une cabine. C'était avant le Covid. Depuis, il regrette que certaines sociétés se soient servies des déserts médicaux pour faire de la télémédecine un marché. L'édile voit pourtant sa cabine comme une solution vitale pour ses administrés. "Il y a des acteurs économiques qui ont saisi une opportunité en se disant : 'On va faire du business', sauf que moi, je considère que la santé, ce n'est pas fait pour faire du business, c'est fait pour soigner les gens. D'ailleurs, l'investissement que j'ai fait n'est pas fait que pour mes habitants. Il est fait pour toutes les personnes qui en ont besoin", assure-t-il. 

Pour l'Ordre des médecins, ces cabines peuvent suffire pour des symptômes très légers, mais jamais pour des patients âgés qui nécessitent des suivis au long cours. "Dans certains territoires, c'est la téléconsultation ou plus rien du tout. On peut comprendre qu'il y a une satisfaction, un soulagement immédiat à ce qui est une réponse, mais en termes de santé publique, c'est très insuffisant", souligne son vice-président, le docteur Jean-Marcel Mourgues.


Virginie FAUROUX Reportage TF1 : David de Araujo et B. Sisco

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