VIDÉO - "On veut faire ralentir, mais pas n'importe comment" : les dos d'âne non conformes, un calvaire pour les automobilistes

par M.L | Reportage : Thomas Misrachi et Marc Kouho
Publié le 12 novembre 2023 à 13h43
VIDÉO - "On veut faire ralentir, mais pas n'importe comment" : les dos d'âne non conformes, un calvaire pour les automobilistes
Source : TF1

La bataille judiciaire est remontée jusqu'au Conseil d'État : une association varoise pourrait obtenir la suppression ou la remise aux normes de ralentisseurs routiers.
Des dos d'âne jugés trop dangereux, à la fois pour les automobilistes et les motards.
Selon l'organisation, la grande majorité de ces ralentisseurs ne satisfont pas aux normes en vigueur.

Six mois après son accident, il est toujours impossible pour Jean-Claude Bataille de se déplacer sans béquilles. Le 16 mai dernier, ce motard avait chuté en redescendant d'un ralentisseur dans la commune du Muy, dans le Var. "Ce jour-là, il avait plu peut-être une heure avant. Et énormément de voitures raclent le ralentisseur et y laissent du gras, de l'huile... Donc dès l'instant qu'il tombe trois gouttes d'eau, cela devient glissant comme une patinoire", explique-t-il dans le reportage du 20H de TF1, à retrouver en tête d'article. 

Depuis sa chute, il n'a pas pu reprendre le travail et se retrouve sans ressources, ce qui l'a poussé à porter plainte contre la ville et le département pour blessures involontaires. "Le problème, c'est que le ralentisseur est trop haut, il est complètement difforme", s'indigne Jean-Claude Bataille, revenu sur le lieu du drame avec notre équipe.

Des réglementations contraignantes... pas souvent respectées

La France compte aujourd'hui 450.000 dos d'âne, selon l'association "Pour une mobilité sereine et durable". Si ces dispositifs permettent de faire ralentir les véhicules dans des zones à risques, une très large majorité d'entre eux ne seraient pas aux normes d'après l'association varoise, qui pointe des dangers importants pour la sécurité des usagers. Elle a décidé le mois dernier de lancer une action devant le Conseil d'État pour faire reconnaître l’illégalité d'un nombre écrasant d'installations.

L'un des membres de l'organisation, Thierry Modolo-Dominati, s'est justement fixé pour mission de traquer ces ralentisseurs illégaux, à l'aide d'un dispositif tout simple : il déploie une boîte de dix centimètres de hauteur sur la chaussée et compare. "Le plateau est deux fois plus haut que ce gabarit, il est donc non réglementaire", explique-t-il par exemple, après avoir identifié un dos d'âne bien trop haut à La Valette-du-Var.

Au-delà de la hauteur, les ralentisseurs doivent se plier à plusieurs autres règles pour pouvoir être mis en place : s'étirer sur une longueur de quatre mètres, être clairement signalés par des panneaux, installés dans des zones limitées à 30 ou 50 km/h, mais pas en dehors des agglomérations, ni sur certaines pentes, dans des virages ou à proximité... Un véritable casse-tête, qui ne dissuade pas pour autant les communes. Des ralentisseurs sortent régulièrement de terre, sans que toutes les précautions soient toujours prises. À Meaux par exemple, en Seine-et-Marne, un dos d'âne en cours de construction et mal signalé a surpris de nombreux automobilistes, une scène filmée par des riverains qui l'ont partagée sur les réseaux sociaux. 

"On ne parle jamais de la sécurité des enfants, des habitants"

Pour éviter ces écueils, une société lyonnaise fabrique des ralentisseurs prêts à poser, coulés dans des moules à l'usine avant d'être mis en place sur la chaussée. Lors d'une installation à Villeurbanne, dans le Rhône, on voit la pose s'effectuer au centimètre près, une attention particulièrement appréciée des riverains. "C'est très bien, on roule trop vite dans cette rue", appuie l'un d'eux. "Il y a une école juste à côté, cela ne peut qu'apporter la sécurité pour le quartier", abonde une passante.

Mais l'accueil de ce type de chantier n'est pas toujours aussi positif, notamment lorsque certains ralentisseurs ne se plient pas à toutes les règles. À Saint-Jean-Le-Vieux, dans l'Ain, la mairie a été condamnée à détruire un dos d'âne jugé non conforme, sur lequel Christophe Lanfrey avait endommagé son véhicule. "On veut faire ralentir les gens, oui, mais peut-être pas n'importe comment", argumente le conducteur, qui avait porté plainte. 

De son côté, le maire de la commune préfère pointer les mauvaises habitudes des automobilistes. "Certains chauffeurs prennent ça pour une atteinte personnelle, de vouloir les ralentir... Les gens ne veulent plus ralentir, c'est là le problème", riposte Christian Batailly, édile sans étiquette, qui continue de défendre l'installation de ces ralentisseurs. "On ne parle que de la légalité, de la hauteur, des problèmes que cela pose pour la mécanique des voitures... C'est hallucinant", s'irrite-t-il. "On ne parle jamais de la sécurité des enfants, des habitants, c'est très regrettable." Pour remplacer le dos d'âne détruit, il a fait appel à un bureau d'études et espère trouver une solution alternative d'ici à la fin de l'année prochaine.


M.L | Reportage : Thomas Misrachi et Marc Kouho

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