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Dans les écoles d'Île-de-France, un personnel sur deux seulement est-il titulaire ?

Publié le 1 septembre 2022 à 18h32

Source : TF1 Info

À l'approche de la rentrée scolaire, Jean-Luc Mélenchon a regretté le recours massif aux contractuels dans l'Éducation nationale.
Il a pris l'exemple de l'Île-de-France, où moins de la moitié des personnels seraient des titulaires.
Si le recours aux contractuels augmente, les chiffres du dirigeant des Insoumis sont très exagérés.

Après une tournée en Amérique du Sud durant l'été, Jean-Luc Mélenchon a retrouvé la France et les sujets qui font l'actualité dans l'Hexagone à l'occasion d'un discours à Châteauneuf-sur-Isère (Drôme). Il y clôturait les universités d’été de la France insoumise et en a profité pour évoquer la situation de l'école, à quelques jours de la rentrée des classes. Alors que les académies peinent à trouver des professeurs en nombre suffisants et que les concours n'ont pas attiré assez de candidats, le chef de file des Insoumis a pointé du doigt le recours massifs aux enseignants contractuels.

"Nous avons besoin de services publics qui fonctionnent, ce n'est pas un caprice ou la protection d'une corporation", a-t-il lancé. "Vous mettez gravement en danger la France quand vous décidez, pour prendre l'exemple de la région la plus peuplée du pays, l'Île-de-France, que plus de la moitié des personnels sont des contractuels et que vous décidez que vous allez embaucher 1000 personnes et les transformer en professeurs en 4 jours". Il s'agit à ses yeux d'une "gigantesque déqualification du métier", contre laquelle il appelle à s'élever. Qu'en est-il de cette proportion ?

À l'échelle nationale, le nombre de contractuels augmente

Rappelons que les personnels contractuels ne sont pas recrutés par le biais de concours. Ils postulent pour occuper des postes ouverts en fonction des besoins et sont engagés au sein de l'Éducation nationale par les académies pour des durées fixes. Des enseignants sont recrutés de la sorte, mais ils ne sont pas les seuls : des assistants d'éducation (ou AED, terme désormais utilisé pour désigner les surveillants) sont également recherchés, ainsi que des AESH, accompagnants d'élèves en situation de handicap.

Au sein de l'Éducation nationale, entre l'année scolaire 2015-2016 et celle 2020-2021, la part des contractuels a augmenté de manière significative. De 14,5%, elle est passée à 22%. Une progression "surtout due à des recrutements d'AED ou AESH", explique à TF1info le ministère de l'Éducation nationale. Ces derniers sont à l'origine de 87% de la hausse globale, nous précise-t-on, suggérant que le volume de contractuels parmi les seuls professeurs a pour sa part peu évolué. Le dernier bilan social présenté par le ministère stipule que dans les établissements publics, les professeurs contractuels sont respectivement 1,4% dans le premier degré et 8,9% dans le second degré.

L'évolution notable du nombre de contractuels s'explique en bonne partie par des recrutements de personnels non-enseignants.
L'évolution notable du nombre de contractuels s'explique en bonne partie par des recrutements de personnels non-enseignants. - Bilan social de l'Education nationale

Des chiffres pour l'Île-de-France surévalués

L'entourage de Jean-Mélenchon, contacté par TF1info, n'a pour l'heure pas indiqué sur quels chiffres il s'appuyait pour affirmer qu'en Île-de-France, plus de la moitié des personnels (de l'Éducation nationale) seraient contractuels. Les éléments chiffrés fournis par les différentes académies de la région (Paris, Versailles et Créteil) permettent néanmoins de contredire cette affirmation.

Dans l'Académie de Créteil, l'une des plus importantes en matière d'effectifs, on recense au total 85.000 agents, parmi lesquels les enseignants sont largement majoritaires : ils sont en effet 65.000, répartis entre titulaires et contractuels. Sur ces 65.000 enseignants, 1200 contractuels sont comptabilisés dans le 1er degré, et 1500 dans le second degré. Les chiffres relatifs aux autres personnels ne sont pas intégralement disponibles, mais quelques brefs calculs permettent de constater que même avec des agents non-enseignants à 100% contractuels (ce qui n'est pas le cas), la part totale des contractuels parmi les effectifs globaux ne dépasserait pas les 26%. Loin de plus de 50% évoqués par Jean-Luc Mélenchon. 

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Fait-on le même constat dans les autres académies franciliennes ? Peu ou prou. À Paris, on compte par exemple dans le 1er degré public 207 enseignants contractuels, sur un total de 8000 enseignants. Soit à peu près 2,5% des effectifs. Une proportion un peu plus importante dans le second degré : 1114 professeurs contractuels sur un ensemble de 11.800, un peu moins de 10%. Le personnel de vie scolaire est quant à lui composé à 85% de contractuels, mais comme à Créteil, il ne représente qu'une part réduite des effectifs totaux. Dans la capitale non plus, les contractuels ne sont donc pas majoritaires. 

À Versailles enfin, les personnels enseignants sont composés à 3% de contractuels dans le premier degré et de 8% dans le second degré. Ils ne sont pas plus nombreux dans les filières dites "administratives" : 7,4%. La part de contractuels parmi le reste des effectifs (AED et AESH notamment) sera largement supérieure, à l'instar de ce que l'on observe dans les autres académies. Sans pour autant qu'elle soit susceptible de rendre les contractuels majoritaires à une échelle globale, quand on se penche sur tous les personnels. 

En résumé, on constate que Jean-Luc Mélenchon surévalue très largement la part des agents contractuels en Île-de-France dans l'Éducation nationale. Si leur proportion augmente depuis plusieurs années, les enseignants restent dans une large majorité des titulaires, eux qui constituent le gros des effectifs. 

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Thomas DESZPOT

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