Sécurité routière : faut-il couper les arbres le long des routes ?

par La rédaction de TF1info | Reportage Guillaume Gruber, Christophe Hanesse
Publié le 27 février 2024 à 16h26

Source : JT 13h Semaine

Une personne sur dix tuée sur la route a percuté un arbre.
Dans le Grand Est, sur 750 km de routes concernées, des milliers d'arbres vont faire l'objet d'un diagnostic pour identifier ceux qui sont malades ou dangereux.
TF1 se penche sur ce problème et ses solutions.

"Avoir des arbres de ce type-là sur un virage, c'est très dangereux". Le département de la Haute-Marne s'est trouvé un nouvel ennemi public à abattre : sur ses routes, il veut couper jusqu'à 735 arbres jugés dangereux. L'objectif est d'augmenter la sécurité sur les axes à 90 km/h, mais les automobilistes sont partagés. "Moi, je suis relativement pour, dit un conducteur interrogé dans le reportage de TF1 ci-dessus. Sur le bord des routes, il y a certainement un diagnostic à poser sur les zones à risque". Un autre ironise : "Les arbres ne traversent pas encore les routes, donc si on ne fonce pas dedans, normalement, il n'y a pas de problème". "Qu'on abatte ceux qui sont malades, ceux qui posent problème, mais en aucun cas ceux qui sont en bonne santé, lance une troisième. Ça fait des lustres qu'on a des arbres le long des routes".

Il y a un siècle, la France comptait trois millions d'arbres sur le long de ses routes. Aujourd'hui, il n'en reste que quelques centaines de milliers. Ils sont pourtant encore impliqués dans 10% des cas mortels d'accidents, selon les chiffres de l'Observatoire de la Sécurité routière.

Il y a quelques mois, une personne a perdu la vie ici. Les responsables de la Haute-Marne parlent d'"arbres tueurs" et d'abattage massif à venir. "J'assume. J'ai fait de la sécurité routière une priorité et bien sûr, je vais respecter le Code de l'environnement puisque les arbres sont protégés", assure face à notre caméra Nicolas Lacroix, président LR du Conseil départemental de la Haute-Marne. Chaque abattage devra être autorisé par l’État, et des plantations compensatoires sont prévues. 

Planter des haies pour former un "airbag naturel"

Dans le département voisin, on essaye de couper le moins possible, mais installer des glissières de sécurité n'est pas la solution miracle. "Derrière la glissière, il nous faut aussi une distance de sécurité, entre la glissière et l'obstacle minimum au moins 90 cm, nous indique Sébastien Kaurin, responsable d'exploitation au Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle. La glissière métallique ou mixte, c'est la meilleure façon, pour l'instant, de protéger l'usager de l'arbre. La glissière va absorber le choc, c'est pour cela qu'il ne faut pas non plus qu'elle soit trop costaude".

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"Depuis plus d'une vingtaine d'années, on s'est posé la question en Meurthe-et-Moselle de ce qu'il fallait faire par rapport à cette question de l'arbre au bord des routes, poursuit Audrey Bardot, vice-présidente PS déléguée aux infrastructures et aux mobilités du Conseil départemental. Donc aujourd'hui, on ne les coupe que si leur état sanitaire le nécessite et systématiquement, on les replante, si on le peut près de la route, mais à sept mètres comme ça, c'est sécurisé".  

À l'origine, les routes arborées retenaient la poussière des calèches et offraient de l'ombre aux soldats de Napoléon. Des arbres qui peuvent encore être utiles aujourd'hui. Pour les défenseurs des arbres, ces plantations le long de nos routes auraient deux intérêts pour notre sécurité. Ce couloir focaliserait notre attention et l'effet tunnel nous ferait instinctivement ralentir. Chantal Pradines, ingénieure, étudie la sécurité routière depuis quinze ans. Selon elle, couper les arbres est une vieille recette inefficace : "Même si c'est contre-intuitif, c'est quand la route est la plus confortable qu'on concentre les accidents. En fait, on ne perçoit pas sa vitesse, et donc on ne perçoit pas qu'il peut y avoir un danger".

Comment sécuriser nos routes sans détruire l'environnement ? Un naturaliste interrogé à la fin de notre reportage, Claude Narvot, bénévole de la Ligue pour la protection des oiseaux, a trouvé la solution il y a 25 ans : planter des haies pour former un "airbag naturel". Une trouvaille cinq fois moins chère que l'installation de glissières de sécurité, et aussi un bon moyen de conserver la biodiversité le long de nos routes.


La rédaction de TF1info | Reportage Guillaume Gruber, Christophe Hanesse

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